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today25/08/2022 36

Arrière-plan
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Chiffre du jour : 50 000 petits agriculteurs dans la filière des dattes risquent de voir leur production pourrir tant les prix proposés par les collecteurs et grands exportateurs sont en dessous des prix de revient trois années consécutives. Ce qui devait être la fête de la récolte se transforme en une catastrophe, une malédiction.

Cela peut ne pas intéresser grand monde, mais il faut savoir que c’est aussi le cas des agrumes, des producteurs de lait, et d’autres spéculations dont la plus importante, celle de la culture de l’olivier.
Cela fait une population de 500 000 personnes concernées, 500 000 familles dans le rural, entre dureté de la vie et protection de notre sécurité alimentaire voire équilibre de la balance commercial donc disponibilité de devises pour acheter des médicaments et des produits importés de premières nécessités à tous les Tunisiens. Cela concerne 10% de l’économie nationale.
Cela concerne la stabilité sociale des centaines de milliers de ménages déjà paupérisés et la sécurité du territoire, cela revêt in fine un aspect stratégique au sens militaire car ces exploitations longent nos frontières aussi…
La filière des dattes repose sur les petits agriculteurs.
Chacun possède en moyenne 120 palmiers dattiers sur une surface entre 1 et 1.5 hectare. La production n’étant pas mécanisée, sur des parcelles relativement petites, avec un accès à l’eau de plus en plus cher, le coût de revient d’un kg de dattes s’élève à près de 3.5 dinars le kg pour la variété deglet ennour, le prix de vente producteur devrait s’élever à entre 3.8 et 4.0 dinars. Aujourd’hui les collecteurs mandatés par les industriels exportateurs le proposent à 2 dinars seulement le kg, soit une perte sèche compensée par le maraîchage et l’agriculture vivrière sous le palmier… trop peu…
Ce n’est ni juste, ni équitable ni soutenable.
Il est à noter qu’en Tunisie, on compte 50 000 agriculteurs qui exercent dans la filière des dattes et 6 millions de palmiers se trouvent dans les régions de Kébili, Tozeur, Gabès et Gafsa sur une superficie de 56 mille ha. La production moyenne nationale s’élève à 340 mille tonnes, dont presque le 1/3 est destiné à l’exportation.
Il est vrai que la demande mondiale croît à 5% en moyenne par an alors que la production croît à 10% en moyenne par an… Il est vrai aussi que les stocks des saisons 2020/2021 et 2021/2022 ne sont pas encore complètement écoulés. Il est vrai qu’il y a les cours du kg à l’international où on est concurrencé par de nouveaux arrivés sur le marché comme le Maroc, principal client de la Tunisie, mais aussi des concurrents classiques comme l’Algérie notamment pour le haut de gamme.
Mais il est surtout vrai que le rapport de force est favorable aux exportateurs disposant de gros moyens financiers avec accès direct aux marchés internationaux ce qui n’est pas le cas des petits agriculteurs.
Et que pour ceux-là personne n’élève la voix pour les soutenir au niveau du Groupement Interprofessionnel des Dattes ni au niveau de l’UTAP ni la SYNAGRI dont c’est le rôle en théorie.
De plus, d’après nos lois scélérates, un agriculteurs ne peut exporter directement s’il ne passe pas par la case cahiers des charges et complications bureaucratiques qui datent des années 60.
Bref…
Il est à rappeler que pour produire des dattes il est impératif de monter jusqu’en haut du palmier, un à un, régime par régime (une vingtaine par palmier), au moins 4 fois par an (élagage et choix des régimes, fécondation printanière, traitement anti araignée, envelopper les régimes par des sacs, la cueillette…) ceci en plus des travaux de tri et le transport aux usines de conditionnements… et ce en plus du travail quotidien de la terre comme le labour régulier, l’apport de sable pour dessaler le sol, les engrais à répandre, l’eau et les horaires aléatoires d’irrigation par le froid d’hiver à l’aube et la chaleur de l’été en pleine canicule, le nettoyage et désherbage,…
Propositions : Plateforme digitale d’offre et de demande peer to peer ; le groupement inter professionnel des dattes donne des prix de référence en juin de chaque année et aide au stockage de manière à maintenir le prix stable toute l’année car l’arrivée en masse de la production en début de saison fait baisser mécaniquement les prix ; permettre l’exportation à tous sous condition sanitaire avec cahier des charges allégé ; multiplier les points de vente du producteur au consommateur…
Les prix producteurs de référence que je propose :
3.5 dinars pour la catégorie 1 dattes de la variété deglet ennour branchées
2.8 dinars pour la deglet ennour catégorie 2
2 dinars pour le vrac deglet ennour
1 dinar pour pour les autres variétés
En dessous de ces prix les petits agriculteurs perdent de l’argent, souvent sans le savoir en absence de comptabilité analytique par parcelle.
Tant qu’on n’a pas résolu les problèmes des régions intérieures du pays, il restera instable indéfiniment, les inégalités sont insupportables pour tout être humain !
Walakom sadid annadhar.

Écrit par: Zaineb Basti



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