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S’il est vrai que la crise épidémique a mis à nu ses défaillances et qu’une prise de conscience de la crucialité d’intervenir en urgence pour sauver nos hôpitaux et améliorer les conditions de travail de nos médecins et cadres soignants commence à se faire sentir, il semble que la situation demeure étonnamment inchangée, ou presque ! Pour ne pas dire, qu’elle va de mal en pis…
Les médecins subissent encore les affres d’une infrastructure vieillissante et d’une rémunération relativement modeste par rapport à leur fatiguant et interminable cursus universitaire. Les agressions perpétrées contre le cadre médical et paramédical sont de plus en plus nombreuses. Un constat malheureux, voire qui déshonore un pays qui a misé sur ses élites pour assurer une couverture sanitaire digne de respect et d’un système de santé performant et résilient.
Sans surprise, des centaines de nos jeunes médecins ont choisi de quitter la Tunisie, laissant derrière eux un “désert” médical difficilement “reboisable”, faute de moyens financiers, de ressources humaines, mais surtout d’opportunités de carrière en Tunisie. Rien qu’en 2021, 970 médecins ont quitté la Tunisie. A première vue, cela témoigne de la qualité professionnelle et scientifique de nos médecins fortement sollicités en France, en Allemagne, au Canada, et un peu partout dans le monde. Mais, il ne faut pas s’en réjouir. Car, à vrai dire, cet exode massif appauvrit nos hôpitaux et cliniques et affaiblit davantage notre système sanitaire.
Certes, d’importants efforts ont été déployés pour remettre à niveau le secteur de la santé. Reste qu’on peine à percevoir ce changement. Les problèmes s’accumulent et le budget du ministère de la santé se rétrécit à mesure que les hôpitaux publics se surchargent, les rendez-vous se décalent, la qualité des soins dans les établissements sanitaires publics se dégrade et les coûts des soins dans les cabinets et cliniques privées continuent à monter en flèche.
Si les résultats du secteur privé sont de plus en plus réjouissants, le problème de la pénurie des médicaments dans les hôpitaux et les pharmacies d’officine, le spectre de la faillite de la pharmacie centrale et l’éternelle crise des caisses sociales et particulièrement de la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM), et tant d’autres données alarmantes nous ramènent à la réalité déplorable, aux tracas que vit le citoyen et aux combats acharnés qu’il mène pour survivre, dans un État constitutionnellement garant “de la sécurité et de la qualité des services de santé”, et donc de l’accès du citoyen aux médicaments.
Qu’en-t-il donc de la pénurie des médicaments en Tunisie ? Quelles mesures à prendre et réformes à engager pour pallier les difficultés que traverse la Pharmacie Centrale de Tunisie avant qu’elle ne rende son dernier souffle ? Les nouvelles dispositions controversées de la loi de finances 2022 peuvent-elles réduire l’ampleur de cette crise ? Comment sortir de cette spirale négative de corruption et de trafic de médicaments ? Et serait-il un jour possible de mettre fin à la détresse et aux calvaires vécus par les affiliés de la CNAM ?
La fluidification du parcours du patient, la digitalisation des services sanitaires et le développement de la télémédecine sont des facteurs clés pour l’amélioration des services de soins en Tunisie. D’ailleurs, la numérisation de l’accès aux soins d’une manière générale, de la prise du rendez-vous, des données médicales, et des services de la CNAM pourrait, semble-t-il, restaurer la confiance des tunisiens dans le système de santé
N’est-il pas grand temps de tirer des leçons de la crise sanitaire ? De s’arrêter sur l’état des lieux du secteur en Tunisie ? D’écouter les voix des médecins et cadres soignants revendiquant l’amélioration de leurs conditions de travail ? Quelle stratégie doit-on mettre en place pour réorganiser le système de santé et répondre au mieux aux attentes des professionnels et des citoyens ? Comment garantir au tunisien l’accès à des soins abordables de qualité ? Où en est le projet de loi relatif aux droits des patients et à la responsabilité médicale après le gel des activités du Parlement ?
Dans un contexte pareil l’on se projette pour se questionner sur les enjeux de la digitalisation du secteur de la santé ! Peut-on vraiment parler de l’e-santé en Tunisie ? Le déploiement de la télémédecine serait-il une alternative pour pallier ce désert médical et surtout le déficit de médecins spécialistes dans les régions de l’intérieur ?
Toutes ces questions et d’autres seront débattues tout au long de cette journée du 31/03/2022, de 7h30 à 19h30 avec les représentants du secteur de la santé en Tunisie, des représentants de l’Etat et des experts. Nous chercherons à la fois à expliquer, apporter des témoignages, des critiques constructives et des pistes d’amélioration dans le but d’identifier les futurs enjeux du secteur de la santé.
Written by: Asma Mouaddeb