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Anis Wahabi : l’investissement privé en Tunisie ne représente que 8% du PIB

today10/03/2025 2

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L’expert-comptable Anis Wahabi a affirmé que « la seule solution pour la Tunisie afin de sortir de la situation économique difficile, créer de la richesse, des emplois et améliorer la qualité de vie est l’investissement public et privé ».

Il a précisé, au micro d’Expresso, ce lundi 10 mars 2025, que le taux d’investissement par rapport au PIB était de 23,5 % en 2000, avant de chuter à 21,9 % en 2010, à moins de 16 % en 2022, et actuellement à moins de 15 %.

Il a également souligné que l’investissement pose problème, précisant que ce taux dépasse 24 % en France, 19,9 % en Italie, 27,1 % au Maroc et 28 % en Turquie.

Il a également mentionné que l’investissement privé en Tunisie représente 55 % du total des investissements, soit moins de 8 % du PIB, ce qui est un niveau très faible par rapport à d’autres pays, notamment asiatiques, où il dépasse les 25 %.

Le taux d’investissement étranger était de 1,5 % en 2013 et de 1,4 % en 2022, ce qui est extrêmement bas. Il a souligné que la Tunisie a un besoin urgent d’investissements étrangers pour stimuler sa croissance économique.

Évolution du cadre juridique de l’investissement

Wahabi  a rappelé que le Code d’incitation aux investissements de 1993 était considéré comme révolutionnaire à l’époque et avait contribué à encourager l’investissement en Tunisie. Cependant, après 2011, il a été jugé trop généreux sans résultats satisfaisants. Cela a conduit à l’élaboration d’un nouveau cadre juridique avec la loi n°71 de 2016 et la loi n°8 de 2017 relative aux avantages fiscaux.

Toutefois, il estime que ce nouveau cadre s’est éloigné du principe de réinvestissement, ce qui a eu un impact négatif sur l’investissement en Tunisie. Il a ajouté que le nouveau système a restreint les domaines d’intervention des incitations à l’investissement, limitant celles-ci au développement régional, à l’agriculture, à l’éducation, aux industries culturelles, à l’animation jeunesse, à l’enfance, aux jeunes entrepreneurs, aux secteurs innovants, à l’économie verte et aux startups.

Dépendance aux autorisations

Il a précisé que le système d’investissement en Tunisie repose sur trois piliers : l’autorisation, les incitations fiscales et les incitations financières.

Malgré la réduction du nombre de secteurs soumis à autorisation, l’expert estime que la Tunisie reste dépendante de ce mécanisme. Un décret de 2018 a défini une liste d’environ 60 activités qui devaient être remplacées par des cahiers des charges dans un délai de six mois, mais cela n’a toujours pas été mis en place. Il a également souligné que même les cahiers des charges en Tunisie sont perçus comme une forme d’autorisation, car le contrôle préalable n’a pas été supprimé.

Selon un rapport du ministère des Finances de 2017, les dépenses fiscales s’élevaient à 3 788 millions de dinars, soit 11 % du budget de l’État. Seulement 59 % de ces dépenses étaient destinées aux entreprises, et 56 % étaient consacrées à des objectifs économiques. Il en résulte que 44 % des incitations ne sont pas réellement orientées vers l’économie, ce qui signifie qu’il n’existe pas un réel encouragement aux entreprises.

Il a également révélé que les incitations fiscales directement dédiées à l’investissement s’élevaient à 339 millions de dinars en 2020, mais ont chuté à 145 millions de dinars en 2022, prouvant la faiblesse du dispositif fiscal d’encouragement à l’investissement.

Concernant le budget, il a affirmé que la politique budgétaire est insuffisante, puisque seulement 6 milliards de dinars sont consacrés à l’investissement sur un budget total de 79 milliards de dinars. Il a comparé cela à 2010, où le budget de l’investissement était de 3 milliards de dinars sur un total de 18 milliards, concluant que l’État semble s’être désengagé de sa politique d’investissement public en raison des difficultés financières.

En ce qui concerne l’investissement privé, il a noté qu’il manque d’incitations suffisantes pour le stimuler.

Recommandations

Anis Wahabi a affirmé que le secteur privé n’a pas besoin d’exonérations fiscales massives, comme des amnisties fiscales, mais plutôt d’un cadre institutionnel amélioré pour l’investissement. Il a critiqué l’idée que la simple modification de la loi sur l’investissement puisse transformer la réalité du terrain.

Il a souligné l’existence de nombreuses institutions et structures dédiées à l’investissement en Tunisie, ce qui entraîne des procédures administratives complexes et un chevauchement des responsabilités. Il a plaidé pour qu’un guichet unique prenne les décisions et facilite les démarches des investisseurs.

Concernant le partenariat public-privé (PPP), il a regretté son développement insuffisant en raison d’un manque de confiance, de compréhension et de complémentarité entre les deux secteurs, ainsi que des craintes du secteur privé.

Il a également recommandé de mieux définir les orientations de l’investissement public, d’améliorer la gestion des projets publics et de revoir le modèle fiscal d’incitation à l’investissement, qui ne joue pas pleinement son rôle en raison du manque de fonds alloués et de l’absence d’évaluation des résultats.

Enfin, il a insisté sur la nécessité d’une gouvernance claire de l’investissement en Tunisie, avec des objectifs et des priorités bien définis, estimant que seule une meilleure gouvernance permettrait d’améliorer la gestion des investissements dans le pays.

Written by: Meher Kacem



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