Express Radio Le programme encours
À douze jours de l’élection présidentielle américaine, Donald Trump a enfin écouté ses conseillers. Ces derniers le suppliaient depuis des semaines d’éviter de se montrer vindicatif, hargneux, comme il l’avait été lors du premier débat, interrompant Joe Biden 71 fois. Le président a, cette fois, réussi à se contrôler. Il s’est montré calme et a gardé un ton mesuré. Ce qui a permis aux téléspectateurs d’assister, pour une fois, à un échange normal entre les deux candidats. La tactique de Trump, ce jeudi soir à Nashville (Tennessee), était de laisser s’exprimer Joe Biden en espérant qu’il allait dire une bêtise ou faire une déclaration qui lui aliène des électeurs. En bref, qu’il s’autodétruise en direct. « On m’a dit : “Si vous le laissez parler, il va perdre le fil parce qu’il est fêlé” », avait déclaré Donald Trump un peu plus tôt sur Fox News.
Mais Joe Biden n’a pas perdu le fil de son discours. Au contraire, il est apparu plutôt clair, énergique, combatif. Ce qui devrait une fois pour toutes mettre un terme aux attaques sur sa prétendue sénilité. Il a poussé Donald Trump dans ses retranchements dans la première partie du débat sur sa catastrophique gestion de la pandémie. On s’achemine vers « un hiver sombre », a-t-il dit alors que le président répétait que le virus « est en train de disparaître ».
Attaques au porte-monnaie
Lorsque Donald Trump l’a accusé d’avoir aidé son fils Hunter à s’enrichir en Chine et en Ukraine et d’avoir lui même reçu des pots-de-vin – des accusations jamais prouvées –, Joe Biden a répliqué qu’il n’avait « jamais touché un sou d’une source étrangère dans [sa] vie » et a aussitôt retourné l’attaque en mentionnant le compte en banque secret du président en Chine, révélé récemment. « Publiez votre feuille d’impôts ou arrêtez de parler de corruption », lui a-t-il lancé. Il l’a également mis sur la défensive en évoquant ces 545 enfants d’immigrés séparés de leurs parents en 2017 et 2018 et qui n’ont toujours pas retrouvé leur famille.
Donald Trump, lui, l’a attaqué sur la loi de 1994 qui a durci les peines de prison et provoqué une incarcération massive des Afro-Américains. Il a aussi tenté de le caricaturer en communiste ayant pour projet de nationaliser la santé et d’imposer des hausses d’impôts. Sans doute plus percutant, Trump a constamment martelé que Biden était un vieux crocodile de la politique, en poste à Washington depuis 47 ans, dont 8 comme vice-président. « Joe, c’est un homme politique », a-t-il dit. « Que des paroles, pas d’action », a-t-il répété chaque fois que son rival parlait de son programme, sous-entendant que lui était toujours un outsider, ce qui ne manque pas d’ironie pour quelqu’un qui occupe le Bureau ovale depuis quatre ans. Mais c’est probablement l’angle d’attaque le plus efficace pour un électeur indécis.
Deux visions aux antipodes
Au final, il ressort de cet ultime débat deux visions de l’Amérique aux antipodes. Biden veut un grand plan d’aide publique pour doper l’économie, que Trump a dénoncé. Il défend les énergies propres et la lutte contre la pollution, quand le président fait, lui, l’éloge de la déréglementation et de l’industrie pétrolière….
La dernière question a porté sur ce qu’ils déclareraient aux Américains le jour de leur investiture. Et leur réponse ne pouvait pas être plus différente. « Nous sommes sur le chemin du succès », a déclaré Donald Trump avant d’attaquer son rival, qui voudrait tout réglementer. « S’il est élu, on va voir une récession comme on n’en a jamais vu », a-t-il avancé. Ce sera un « très très triste jour pour ce pays ». Joe Biden lui a répondu : « Je suis un président américain. Je vous représente tous. Que vous ayez ou non voté pour moi. Et je vais tout faire pour que vous soyez représenté. Je vais vous donner de l’espoir. » Ce qui est en jeu dans ce vote, a-t-il conclu, c’est « la décence, l’honneur, le respect, traiter les gens avec dignité, faire que tout le monde ait sa chance et je vais m’assurer que vous ayez tout ça ».
Est-ce que la métamorphose de dernière minute de Donald Trump n’arrive pas trop tard alors que près de 50 millions d’Américains ont déjà voté et qu’il reste très peu d’indécis ? Lors du dernier débat en 2016 contre Hillary Clinton, il avait là aussi adopté un ton plus mesuré et évité de parler à tort et à travers. Ce qui avait apparemment convaincu une partie des électeurs conservateurs, qui étaient encore réticents. Dans la foulée, il était devenu le 45e président des États-Unis.
Written by: Manel gharbi