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Le projet de réforme de la loi 35-2016, portant fixation du statut de la Banque centrale de Tunisie et consacrant l’indépendance de cette dernière, déposé au parlement depuis juin 2023, pourrait constituer un nouvel affront et un point de divergence avec le FMI, affirme l’Observatoire tunisien de l’économie, dans une note intitulée « Réforme du statut de la Banque Centrale Tunisienne : Indépendance conditionnelle ou fin de l’indépendance de la BCT ? », publiée le 1e novembre courant.
«Qu’il s’agisse d’indépendance « conditionnelle » ou de fin de l’indépendance de la BCT, cette réforme pourrait bien avoir l’ambition de mettre fin à un diktat du FMI qui a duré sept ans », souligne l’OTE.
Et de rappeler que lors des récentes assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale au Maroc, une question cruciale a été posée à Jihad Azour, Directeur du Département du Moyen-Orient et d’Asie centrale du FMI, concernant le projet de réforme du statut de la BCT et son incidence sur les négociations en cours.
En réponse, Azour a eu l’occasion de rappeler les objectifs relatifs à l’indépendance des banques centrales selon le FMI, et ce, en défendant l’idée que cette indépendance pouvait être « conditionnelle », mais sans pour autant se prononcer sur le cas spécifique de la Tunisie.
« Le verdict du FMI concernant la réforme de la BCT a potentiellement des chances d’être rendu à l’occasion d’une mission prochaine de revue du FMI ». Cette visite de suivi sur « les développements économiques en Tunisie » a été annoncée par Azour, à cette occasion, au titre de l’article IV et de la coopération en cours ».
« Pour comprendre les enjeux qui se jouent à travers cette réforme, il est important de rappeler que le vote de la loi sur l’indépendance de la BCT a constitué une pré-condition à l’accord au titre de la facilité élargie de crédit de 2016, avec le FMI ». A cette époque, l’OTE avait mis en évidence les pressions du FMI visant, en fin de compte, à « désarmer la BCT face à sa mission de stabilisation du système financier».
L’OTE avait, d’ailleurs, démontré l’inefficacité du critère d’indépendance d’une banque centrale pour atteindre l’objectif annoncé de stabilisation de la monnaie et du système financier au niveau mondial, en particulier dans les pays en développement. La suite a montré que parmi les seules prérogatives restantes à la BCT, après promulgation de son indépendance en 2016, l’augmentation des taux d’intérêt n’a pas eu d’impact significatif sur l’inflation qui n’a cessé d’augmenter depuis, en Tunisie.
En proposant de réformer les statuts de la BCT, ce projet de loi représente, finalement, une occasion opportune pour relancer le débat sur le rôle qu’elle peut jouer pour la souveraineté du pays, et sur la nécessité de reconnecter les politiques monétaires avec les orientations économiques et les politiques budgétaires de l’Etat, relève encore, l’observatoire.
Et de préciser que le projet de réforme de la loi 35-2016, soumis à la commission de finances de l’ARP, comporte trois amendements importants.
Le premier amendement propose, notamment, d’autoriser la BCT à acheter des prêts ou à procéder à des opérations de prise en pension à la trésorerie générale de l’État, ce qui était explicitement interdit par la loi de 2016.
Le deuxième amendement autorise la Banque des banques à couvrir le déficit budgétaire sur demande du gouvernement et avec l’approbation de l’Assemblée des Représentants du Peuple, selon des conditions bien définies relatives au montant, à la durée, à la fréquence de ces demandes, ainsi qu’à la durée du remboursement.
Enfin, un amendement concerne les prérogatives de nomination et de limogeage du gouverneur qui seront attribuées au président de la République.
« En autorisant le financement direct du Trésor par la BCT, c’est à dire sans que cela ne s’effectue systématiquement à travers les banques commerciales, les amendements pourraient potentiellement mettre fin à une interdiction qui consacrait et caractérisait « l’indépendance » de la BCT. Dans ce sens, cette réforme pourrait rendre moins difficile le dilemme qui s’imposait au Trésor, entre le financement local (dette intérieure) à un « taux d’intérêt rédhibitoire » et le financement en devises de bailleurs étrangers (dette extérieure) avec leur lot de conditions » considère l’observatoire.
S’exprimant le 1e novembre, lors d’une journée parlementaire sur la BCT, le gouverneur Marouane Abassi avait affirmé que l’indépendance de la Banque Centrale, est un faux problème assurant que l’institut d’émission coordonne quotidiennement et étroitement avec le ministère des Finances sur toutes les questions financières.
Pour rappel, une visite d’une équipe du Fonds Monétaire International (FMI) en Tunisie est annoncée du 5 au 17 décembre 2023, pour une mission de revue périodique.
TAP
Written by: Yosra Gaaloul