Express Radio Le programme encours
Le PIB tunisien devrait s’établir cette année à 93,1 milliards de dinars constants, en hausse de 2,2% par rapport à l’an dernier mais sans atteindre son niveau pré-pandémique : 96,5 milliards de dinars en 2019. La croissance économique devrait ralentir en 2023 pour s’établir à 1,6% et la Tunisie ne devrait retrouver le niveau de richesses produit avant la crise de la Covid, qu’en 2024. Quant au niveau de vie matériel du Tunisien (PIB par habitant en dinars constants), il ne pourra dépasser – de peu – son niveau de l’année 2010 (avant la révolution) qu’en 2024 selon les prévisions.
Le sous-investissement dont souffre la Tunisie depuis plus d’une décennie, va s’aggraver au cours des prochaines années. De 21,2% en moyenne entre 2015 et 2019, le taux d’investissement a dégringolé à 14,4% en 2021 et devrait rester en-deçà de 18,5% d’ici 2027. Pour cette année, il devrait s’établir à 15,9% pour un taux d’épargne historique : 6,9% (année de la Covid-19 exceptée).
L’inflation devrait s’établir à 8,1% en moyenne annuelle en 2022 après 5,7% en 2020-2021. Elle devrait grimper à 9,4% à la fin de cette année et s’accentuer en 2023 pour atteindre son plus haut niveau depuis l’année des émeutes du pain : 8,5% vs 8,6% en 1984.
Les prévisionnistes du Fonds Monétaire International anticipent un fort ralentissement des échanges extérieurs de la Tunisie pour cette année. Les exportations de marchandises en volume qui auraient bondi de 12,4% en rythme annuel l’année dernière, devraient progresser de seulement 4,2% cette année et bien moins en 2023 : 2,5% en rythme annuel. De même pour les achats de la Tunisie en volume qui ont nettement repris en 2021 (9,4% en glissement annuel après -15,0% en 2020 en raison des confinements induits par la crise sanitaire). Les importations en volume devraient augmenter de seulement 2,3% cette année, sans doute en raison du tarissement des liquidités en devises du pays. Un rebond de 4,2% est attendu en 2023.
Les dépenses totales de l’État vont continuer d’augmenter cette année pour s’établir à un plus haut depuis le début des années 1980 : 35,0% du PIB après 33,2% l’année dernière. Selon le Fonds, elles devraient commencer à refluer à partir de 2023 pour s’établir à 33,5% du PIB. Le reflux devrait se poursuivre jusqu’en 2027. Malgré l’anémie de la croissance économique, les recettes de l’État ont elles aussi continué de progresser pour atteindre un pic à 28,4% du PIB cette année. Elles devraient stagner à partir de l’an prochain à 28,2% et même refluer légèrement à partir de 2024.
La dette de l’État explose : de moins de 50 milliards de dinars en 2015, elle s’établirait cette année selon les données du Fonds, à 128 milliards et 142,1 milliards de dinars l’an prochain. Elle devrait continuer à ballonner au-delà de 2023 jusqu’en 2027. Rapportée au PIB, la dette s’établirait cette année à 88,8% et devrait atteindre un pic historique (89,2% du PIB) en 2023.
Après avoir atteint un creux à 2,5 et 2,9 milliards de dollars respectivement en 2020 et 2021, le déficit courant devrait s’accentuer cette année pour atteindre 4,2 milliards de dollars. À ce niveau, il représenterait selon le FMI 9,1% du PIB contre 6,1% en 2021. Pour le Fonds, ce déficit devrait s’atténuer en 2023 à 3,9 milliards de dollars représentant 8,0% du PIB ; atténuation qui devrait se poursuivre jusqu’en 2027.
Le cas de la Libye mis à part, la Tunisie devrait connaître avec le Maroc sa croissance économique la plus anémique en 2022 (1,6%). Pour l’an prochain, la croissance du PIB de l’Algérie, de l’Égypte et la Tunisie devrait baisser nettement alors que le Maroc devrait enregistrer un rebond appréciable à 3,1%. Les prévisionnistes du Fonds estiment que la situation en Libye devrait se « normaliser » et le PIB libyen devrait afficher un rebond de rattrapage de +17,9%. Les données indiquent par ailleurs qu’à partir de cette année, le PIB par habitant du Tunisien est devenu le plus faible de toute la région (3816 $). Après le Libyen (6026 $), c’est désormais l’Égyptien qui est devenu le citoyen le plus riche d’Afrique du Nord (4504 $).
Dans ses nouvelles prévisions, le Fonds prévoit l’an prochain une croissance de seulement 2,7% au niveau mondial, tout en indiquant qu’une économie sur trois est déjà ou sera en récession. En ce sens, les principaux partenaires commerciaux de la Tunisie connaîtront en 2023 un net ralentissement économique. Si la France semble échapper de justesse à la récession (le FMI prévoit une croissance positive de +0,7% en 2023), l’Allemagne et l’Italie verront leur PIB reculer l’an prochain (-0,3% et -0,2%). La Chine, elle, subit toujours les frais de l’épidémie de Covid et des blocages prolongés de son économie. Elle devrait connaître en 2022 sa pire année depuis plus de quarante ans, si l’on excepte la pandémie en 2020, avec une croissance attendue de tout juste 3,2 %, avant de repartir légèrement en 2023 (4,4 %).
Source : Ecoweek n° 37 | 2022
Written by: Asma Mouaddeb