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A l’occasion de la Journée internationale des migrants, Ecomag a invité le sociologue, universitaire et homme politique Mahdi Mabrouk pour débattre de la migration et de la politique migratoire tunisienne.
Il a indiqué que toute politique migratoire doit se repose sur quatre piliers et fondements, à savoir les législations, les institutions, le discours politique et les ressources humaines.
Pour ce qui est des législations, il a affirmé que la Tunisie dispose de plus de 35 accords internationaux, ainsi que nombre de conventions bilatérales, outres les lois nationales, notamment la loi n° 2004-6 du 3 février 2004, relative aux passeports et aux documents de voyage : « ces lois sont rigoureusement appliquées, mais il existe des lacunes législatives, spécialement dans le domaine de la protection des réfugiés.
Concernant les institutions, il a fait savoir que la Tunisie a mis en place des opérateurs publics qui gèrent la migration, notamment l’Agence Tunisienne de Coopération Technique (ATCT) depuis 1972, l’Office des Tunisiens à l’Etranger (OTE) depuis 1988 OTE, ainsi que l’Observatoire National de la Migration depuis 2014 et le secrétariat d’Etat aux migrations depuis 2012.
Quant au discours politique autour de la question migratoire, il a indiqué qu’il en existe désormais un, malgré ses lacunes, précisant que l’ancien président de la République, Zine el Abidine Ben Ali « ne parlait pas de la migration ».
Pour ce qui est des ressources humaines, il a fait savoir que des centaines de fonctionnaires travaillent sur la question de la migration, dans les différentes institutions.
Mahdi Mbarek a également affirmé que la politique migratoire tunisienne est caractérisée par un « surinvestissement pénal », faisant savoir que la loi de 2004 est considérée parmi « les plus extrémistes dans le monde ».
Néanmoins, il a ajouté que notre politique migratoire est « pragmatique », puisque la Tunisie utilise la question migratoire pour faire pression, notamment sur l’Europe.
Par ailleurs, il a indiqué que le discours officiel relatif à la migration a créé « une xénophobie et parfois même une négrophobie » au niveau social, attestant que la société tunisienne a développé une haine envers les migrants, spécialement les subsahariens : « les éléments de langage du discours officiel tunisien (complot contre l’identité, changement démographique, etc…) ont impacté la société tunisienne ».
L’universitaire a également précisé qu’il existe un « SMIG » relatif aux droits humains dans le traitement des questions migratoires en Europe, affirmant que ce n’est pas le cas en Tunisie : « prenons l’exemple de l’accès à la santé. Il existe en Europe, où un migrant clandestin peut accéder à ce droit humain. En revanche, ce n’est pas le cas en Tunisie, où des femmes subsahariennes accouchent carrément sous les arbres ».
Il a évoqué les incidents des derniers mois, les qualifiant de « violations qui ne peuvent pas être tolérées ». Dans ce sens, il a affirmé que, dans certaines régions en Tunisie, « on loue désormais des oliviers pour les subsahariens comme résidences ».
Le sociologue a mis en exergue le contexte international et la crise économique aigue qui ont endurci le traitement des questions migratoires.
Dans ce cadre, il est à rappeler que la présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni, et le Premier ministre britannique, Rishi Sunak ont annoncé le cofinancement d’un projet italo-britannique relatif au rapatriement volontaire assisté vers les pays d’origine, en faveur des migrants bloqués en Tunisie.
Written by: Meher Kacem