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Washington annonce de nouveaux droits de douane sur des produits européens

today31/12/2020 5

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Cette mesure constitue le dernier développement dans le long bras de fer qui oppose les États-Unis à l’Union européenne autour de Boeing et d’Airbus.

Il n’y aura donc pas de trêve des confiseurs entre les États-Unis et l’Europe. Washington a annoncé mercredi de nouveaux droits de douane sur des produits français et allemands, en représailles à ceux imposés par l’Union européenne, qu’ils jugent excessifs et injustes en raison du périmètre choisi pour les calculer. Cette nouvelle offensive, applicable le 12 janvier, augmente de 25 % les droits de douane sur les vins non pétillants, moûts de raisin et cognacs, et de 15 % sur les pièces de fuselage, d’empennage et autres pièces aéronautiques – jusque-là épargnées alors que les avions complets étaient déjà taxés à 15 % –, selon une liste publiée jeudi par le représentant américain au Commerce (USTR). Ces taxes, annoncées trois semaines avant la fin du mandat de Donald Trump, s’ajouteront à celles déjà imposées depuis 2019 sur des importations européennes comme le vin, le fromage, l’huile d’olive ou le whisky, ainsi que sur les avions d’Airbus.

« Cette action américaine unilatérale perturbe les négociations en cours entre la Commission et le représentant américain au Commerce pour trouver un règlement dans le long conflit entre les avionneurs [Boeing et Airbus, NDLR] », a réagi la Commission européenne dans un communiqué jeudi. « L’UE va collaborer avec la nouvelle administration américaine le plus tôt possible pour poursuivre ces négociations et trouver une solution pérenne à cette dispute », ajoute l’exécutif européen.

Impact sur les marchés financiers

« On redoutait l’escalade du conflit, on y est, et ça va durer », a déploré auprès de l’Agence France-Presse le président de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux français (FEVS), César Giron, estimant que le manque à gagner pourrait dépasser le milliard d’euros pour la filière viticole. La filière française des vins et spiritueux est « sacrifiée pour un différend sur l’aéronautique », dénonce la Fédération. Airbus a regretté « que l’USTR ait décidé d’une escalade de ce conflit en prenant une mesure qui porte également préjudice à l’industrie manufacturière, aux travailleurs et aux consommateurs américains ». L’avionneur a ajouté être « convaincu que l’Europe réagira de manière appropriée ». Airbus fait valoir que les nouvelles taxes pénaliseront en particulier les importations de pièces pour son usine d’assemblage de Mobile, dans l’Alabama.

L’extension des droits de douane s’est ressentie sur les marchés : en fin de matinée, Remy Cointreau perdait 3,15 % à 153,60 euros (plus forte baisse du SBF120) et Pernod Ricard 1,25 % à 158,10 euros, tandis qu’Airbus cédait 0,19 %. Washington avait été autorisé à prendre des représailles douanières par l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Et en octobre, dans une décision miroir, l’institution a également autorisé l’UE à appliquer des droits de douane supplémentaires sur des produits importés des États-Unis.

Un conflit qui dure depuis 2004

Airbus et son concurrent américain Boeing, et à travers eux l’Union européenne et les États-Unis, s’affrontent depuis octobre 2004 devant l’OMC sur les aides publiques versées aux deux groupes, jugées illégales, dans le conflit commercial le plus long et le plus compliqué traité par le juge de paix des échanges mondiaux. Les États-Unis ont été autorisés en octobre 2019 à imposer des taxes sur près de 7,5 milliards de dollars (6,8 milliards d’euros) de biens et services européens importés chaque année, la sanction la plus lourde jamais imposée par l’OMC. Washington impose depuis certains produits importés de l’Union européenne à hauteur de 25 %, 15 % pour les avions (entiers) Airbus. En représailles, l’UE impose depuis début novembre des droits de douane sur 4 milliards de dollars d’exportations américaines. Les avions Boeing sont ainsi taxés à 15 %, des produits agricoles (tabac, patates douces, blé, fruits, etc.), agroalimentaires (alcools forts, chocolat, etc.), ou manufacturés (tracteurs, pelleteuses, pièces de vélo, etc.), le sont à 25 %.

Mais Washington estime avoir été pénalisé par le mode de calcul choisi, qui a, selon l’administration Trump, conduit à un montant trop élevé de droits de douane prélevés sur des produits américains. En cause, d’une part la période de référence, d’autre part le périmètre géographique. Ainsi, «  pour mettre en œuvre ses tarifs, l’UE a utilisé des données commerciales d’une période au cours de laquelle les volumes commerciaux avaient été considérablement réduits en raison des effets terribles sur l’économie mondiale du Covid-19  », dénonce l’USTR.

«  Le résultat de ce choix a été que l’Europe a imposé des droits de douane sur beaucoup plus de produits que ce qui aurait été couvert si elle avait utilisé une période normale. Bien que les États-Unis aient expliqué à l’UE l’effet de distorsion de la période choisie, l’UE a refusé de modifier son approche  », souligne encore le communiqué. Les États-Unis ont ainsi annoncé «  changer leur période de référence pour s’aligner sur celle utilisée par l’Union européenne  ». Par ailleurs, déplore Washington, «  l’UE a fait un autre choix qui a injustement augmenté le montant  » des droits de douane prélevés en excluant de son calcul le Royaume-Uni, et il estime que «  l’UE doit prendre des mesures pour compenser cette injustice  ».

EFM/AFP

Écrit par: Manel gharbi



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